top of page

MEDIA

« C’est fini, alors…

— Oui, dit le vieil homme. Rien à faire. » Le garçon s’effondra.

Mais sa responsabilité était maintenant de porter la dépouille de son petit frère, Lim.

Leur mère était trop brisée par le deuil, le père… depuis longtemps parti.

Alors le garçon souleva le fardeau bien trop léger de la route calcinée, et marcha. Il ne s’arrêta que pour se reposer sur la ruine de l’une de ce que grand-père appelait une voiture

— quoi qu’ait pu être cette vieille chose rouillée. Le garçon sauta sur ses pieds, impatient : « Ils vont venir ?

— Ils viennent toujours. » Il observa une pause, puis : « une fois invoqués par les oiseaux, ils finissent toujours par venir. »

Le Grand Silence les entourait.

Les légendes disaient que le Monde-d’avant n’était que bruit sans fin. Disparu depuis longtemps, tout cela. Il n’y avait que le désert, et le silence, désormais. Ils attendirent patiemment, assis sur la bande de noirceur torturée qui jadis avait été appelée une route.

« Allons-y. Ça pourrait prendre des jours entiers, des semaines peut-être, avant qu’ils viennent.

— Non ! Ils seront bientôt là, j’en suis sûr. »

Le grand-père ne répondit rien. Sans doute attendait-il que la patience du garçon s’étiole. Mais ce fut le jeune qui, à la fin, eut raison : deux lancés n’étaient pas écoulés, qu’un vaisseau s’élevait contre le ciel du soir.

Bientôt les voix crépitantes des corneilles les entourèrent. Il glissait majestueusement, flottant comme un nuage plutôt que volant : l’aérostat jetait ses ailes contre les sautes exubérantes de l’air ; farouche, insensible à la peur.

Le garçon cria : « Je la vois ! »

Était-ce vraiment elle ? La dame-aux-trois-yeux ?

Le vieil homme sourit avec mépris, certain quant à lui que c’était plutôt l’une de ces hautes silhouettes, ceintes de cuir et aux yeux bridés, qui la servaient.

Elle… elle n’avait pas été vue par les gens du sol depuis une éternité.

En quelques minutes, le petit corps de Lim fut élevé, puis avalé par la lumière de l’une des baies.

« Les corbeaux… les corbeaux auront son corps maintenant, dit le garçon en larmes, et ils apporteront son âme aux cieux.

— C’est fini, garçon, répondit platement le vieil homme. Rentrons.

— Non, rétorqua le garçon avec force : ce n’est pas fini. C’est juste le commencement… »

Nicolas LEBRETON - 2016

« It is over, then…

— Yes, the old man replied. Nothing about it. »

The boy shriveled. But his was the responsibility now, to carry out the remains of his little brother, Lim. Their mother was too weak with grief, the father… long gone. So the boy lifted the all too light burden on the starched road, and sat there on the ruin of an old rusted thing that grandpa called a car

— whatever that may have been. The boy sprang on his feet, impatient :

« Will they come ?

— They always come. » He paused, then : « Once they are summoned by the birds, they always come, eventually. »

The Great Silence surrounded them. Legends said the world-of-before was constant noise. Long gone now. Only desert land, and silence, now. They waited patiently, sitting on the strip of tortured blackness that once had been called a road.

« Let’s go. It may take days, even weeks, for them to come.

— No ! They will be here soon, i am certain. »

The grandfather replied nothing. Maybe he was waiting for the patience of the boy to grow thin. 

But the youngster was right, in the end : not two throws had passed, that a ship rose on the evening sky. 

Soon the crackling voices of the crows surrounded them.

It hovered in majesty, floating as a cloud more than flying. The airship threw its wings against the gushing flows of air, fierce and seemingly above all worries.

The boy screamed :

« I see her ! »

Was it really her ? The triple-eyed lady ? The old man sneered, certain for his part that it was, more certainly, one of those slant-eye, towering figures, clad in dark leather that served Her. She had not been seen by the ground people for ages.

In a matter of a minute, the small body of Lim rose to the light inside the bay. And as swiftly as it had come, the airship bowed to the wind and flew away.

« The ravens… The ravens will have his body now, said the boy in tears, and carry his soul to the heavens.

— It is over, boy, replied flatly the old man. Let’s head home.

— No, it is not, the boy replied, strongly : It is not over. It is just the beginning… »

Nicolas LEBRETON - 2016

En téléchargement sur toutes les plateformes :

Anchor 2
bottom of page